Inscrit l'année dernière avec lolo pour courir ce trail pour mes 50 ans, une préparation de 10 mois en tête et c'est parti!
Première embûche lors de ma blessure avant le marathon de Rome, m'obligeant à faire l'impasse dessus en me cassant un peu le moral.
Deuxième déboire lors de mon abandon au trail du Beaufortain, après 70 km sans bâton, remettant les pendules à l'heure sur la difficulté qui arrivait quelques mois plus tard. Grosse remise en question et finalement départ d'un vrai entrainement “diag” escaliers,descentes muscu et hygienne de vie saine (au revoir apéros et saucisson, dur, dur)
J-3 semaines, le sort s'acharne de nouveau, douleur dans le tibia droit, verdict: tendinite sévère du releveur droit, annulation de la course à prévoir. Anti inflammatoires, infiltrations, cataplasme, massage, arrêt de travail car je ne pouvais plus marcher en fin de journée, puis déprime...
j-5 fabrication d'une attelle pour me permettre de garder le pied à angle droit lors de la course, et repos en attendant le départ.
Jeudi 21h départ du grand raid en compagnie de lolo, qui me soutient, et d'un gégé de secours trouvé à l'hôtel. Une poignée de main avec Fred qui part 10 min après nous et voilà c'est parti.
Je n'ai jamais vécu cette ambiance en course, des milliers de gens amassés sur plusieurs kilomètres qui applaudissent, encouragent et tendent leurs bras pour transcender n'importe quel coureur.
La douleur est présente mais l'ambiance me sort de ma morosité et me pousse vers l'avant (enfin je suis plutôt derrière).
Séverine et les enfants m'attendent au km7 à la fin de la route goudronnée pour voir si je peux continuer ou s'il faut me ramener, avant que les choses sérieuses ne commencent.
Tous sont là, même lolo, ça fait plaisir, les larmes me viennent, je ne peux plus contenir mon émotion, je ne peux pas arrêter maintenant, bisous d'amour et réconfort et me voilà parti dans la nuit, entouré de plein de coureurs mais si seul dans ma tête...
Les kilomètres vont défiler au rythme des ravitos, les sentiers sont de plus en plus difficiles et ma foulée n'est pas naturelle. La nuit va passer et la lumière du jour va faire du bien, les gens sont super gentils, l'esprit trail est bien là. Mon objectif immédiat est de rallier Cilaos ou je ferai le point sur la suite à donner.
Arrivée à cilaos (km 72), j'ai mal mais je peux toujours avancer, pour le reste du physique, ma préparation était bonne donc pas d'autre soucis, parfait je peux repartir après avoir rassuré ma petite famille par téléphone qui en profite pour me rebooster un coup.
je repars pour une longue montée avec cette fois l'objectif d'arriver à la deuxième base de vie située au km 127. Je vais emprunter des sentiers de plus en plus difficiles. Escaliers de tout genre, pierres, racines, dévers, cette course est très exigeante et empêche de pouvoir réellement profiter du paysage. La nuit va arriver vite, le but est que ce soit si possible la dernière...
Les descentes difficiles et techniques vont commencer à peser sur ma jambe droite et une douleur au niveau du genou va commencer doucement à se faire sentir. Cette partie de la course concentre une grosse partie de dénivelé négatif et le fait que je ne puisse pas utiliser l'amorti de mon pied et prendre les chocs avec le talon va me pénaliser. Dommage car j'ai énormément travaillé ce sujet depuis quelques mois (certainement trop...) et je ne peux pas me lâcher, pire je suis dans la retenue et je subis de plus en plus le parcours. Je n'ai plus que la douleur au niveau du genou dans la tête. L'arrivée à la base de vie est un soulagement, je profite d'un gros ravito et du monde pour me ressourcer, mais dans ma tête le moral baisse au point de penser à l'abandon. J'appelle severine pour lui demander de me retrouver chemin ratineau, le ravitaillement suivant. Je ne pourrai pas la voir car c'est compliqué pour elle de se garer, je repart donc pour une partie de D- qui va me faire souffrir, au point ou je n'arrive plus a prendre ce plaisir qui me fait aimer le trail jour après jour.
Me voici maintenant à la possession km 144, Séverine et les enfants sont là, je vais repartir avec eux, j'ai trop mal, tient à côté de moi lolo arrive, en forme le vieux, un bon moral, ca me fait plaisir de le voir. Bien évidemment il me pousse à repartir,m'envoie vers des masseurs sympathiques et reprend son chemin...
Une tente, des gars sympathiques, j'enlève mon attelle, mes chaussures et me voila massé, par des gens qui vont supporter mon odeur de pieds et tenter de faire passer cette tendinite du genou. Tout me pousse à repartir, je sais au fond de moi ce qui m'attend, même si on peut dire qu'il n'y a que 20 km à faire. J'ai galéré, pesté et la dernière descente m'a paru interminable au point d'appeler Séverine pour lui demander si je ne rêvais pas, si je ne m'étais pas perdu,( la troisième nuit sans dormir ne m'a pas aidé). La douleur était tellement présente. Et puis au loin le visage de mes enfants, des anges venus me sauver, l'émotion en moi a été indescriptible.
Voila la ligne qui s'approche, mes enfants en gardes du corps, et lolo au loin, avec qui se terminera cette aventure dans un état second, puis Séverine pour me câliner et me faire oublier quelques secondes cette course.